Running : L'exploit sportif peut-il tout justifier ?

Un défi sportif controversé : 7 Major Marathons en une année

Le 26 janvier 2025, RMC et un athlète influenceur populaire annonçaient leur prochaine collaboration autour d'un projet sportif ambitieux : participer aux 7 Major Marathons au cours de la même année.

Cette annonce a fait couler beaucoup d'encre, non pas tant pour l'exploit sportif en lui-même, mais plutôt pour son impact environnemental.

Un projet noble sur le plan sportif

L'idée, sur le plan sportif, est inspirante : repousser ses limites en participant non pas à un ou deux marathons, comme le font la plupart des athlètes, mais bien à sept en une seule année. On imagine aisément que cette aventure donnera lieu à du contenu motivant, suivant l'athlète à chaque étape de sa préparation pour prouver qu'avec de la détermination, il est possible d'aller toujours plus loin et de profiter pleinement des bienfaits du sport.

Certains, toutefois, pourraient critiquer la valeur sportive d’un tel défi : courir sept marathons en une seule année implique presque inévitablement une préparation et une exécution « bâclées » pour chaque course. D’autres diront que cela n’a rien de nouveau — après tout, certains athlètes extrêmes ont déjà couru un marathon par jour pendant une année entière (Hilde Dosogne et Gary McKee) !

Qui sommes-nous pour juger les défis des autres ?

Mais qui sommes-nous pour juger la valeur des défis que se fixent les gens ? Si cet athlète s’éclate dans son projet, qu’il parvient à toucher des personnes sensibles à son exploit et qu'ensuite elles se mettent au sport, nous ne pouvons que l’encourager.

Ce qui a véritablement choqué dans ce projet, c’est son empreinte environnementale.

L’impact environnemental : une controverse justifiée

Participer aux 7 Majors signifie voyager dans une seule et même année à Tokyo, Boston, Londres, Berlin, Chicago, New York et Sydney (récemment ajoutée à la liste). Le problème saute immédiatement aux yeux : ces déplacements nécessitent une dizaine de vols long-courriers, qui sont parmi les plus polluants. Qu’il y ait ou non un dépassement sportif, une chose est certaine : les limites de l'empreinte carbone recommandée par personne seront elles, largement pulvérisées.

Faut-il pour autant incriminer l’influenceur ?

Une « chasse aux sorcières » serait inutile. Nous ne savons pas dans quelle mesure ce projet faisait partie de ses contrats, ni quelle marge de manœuvre il avait dans son organisation.

Ce qui interpelle davantage, c'est qu’en 2025, alors que la cause environnementale ne peut plus être ignorée, un grand média comme RMC ait fièrement annoncé son implication dans un tel projet, sans même sembler envisager son impact écologique. Pire encore : il est inquiétant qu’aucune personne de l'équipe n’ait pensé intégrer ce sujet lors de la communication officielle. A l’heure ou nous publions cet article, aucune déclaration n’a été faite dans ce sens.

Ce cas nous amène à nous poser la question suivante : l'exploit sportif peut-il tout justifier ? Il y a 30 ans peut-être, mais aujourd’hui ?

L'exploit sportif peut-il tout justifier ?

Les commentaires négatifs sur Instagram soulèvent une critique intéressante : ce projet serait à l’opposé des valeurs du running.

Pour beaucoup, la course à pied est le sport le plus simple au monde : on enfile une paire de chaussures et on part courir. L'exploit se trouve partout, à chaque instant, pour chacun. Il suffit s’implement de faire preuve d'imagination pour inventer son propre défi.

Alors pourquoi forcément courir à l’étranger lorsque l'on est pas athlète professionnel (dans le sens élite du terme)? Le même défi pourrait être relevé en partant de chez soi. Certes, les images et la communication n’auraient pas la même gueule... mais cela nous ramène à la question de départ : l’exploit sportif peut-il tout justifier ?

Les plus pessimistes pourraient réclamer l'annulation pure et simple du projet. Mais peut-être existe-t-il une autre possibilité...

Une opportunité en OR de rentrer dans l’histoire ?

Si RMC et l’influenceur ont commis une erreur médiatique en annonçant ce projet de manière « naïve », il leur reste une opportunité en or de transformer la polémique en succès.

Pourquoi ne pas faire un mea culpa et repenser entièrement la logistique du projet ?

Le projet est vraiment super : montrer les bienfaits du sport et du dépassement de soi. Le seul problème, c’est son empreinte carbone catastrophique.

Imaginez : une déclaration publique dans laquelle RMC et l’athlète expliqueraient qu'ils ont pris conscience de l'impact écologique du projet et, pour le rendre encore plus inspirant, ils décident que tous les déplacements seront réalisés avec des modes de transport propres (train, voilier, vélo, etc.).

Voilà un projet qui aurait un véritable impact, bien au-delà de l'initiative initiale.

Des exemples inspirants

Des projets sportifs qui repoussent les limites tout en respectant l’environnement, il y en a plein. En voici deux exemples :

• Jean Registre (Jean Rouaux) : Il s'est lancé le défi d’atteindre le sommet de l’Ama Dablam au Népal... en y allant à vélo depuis Chamonix. Un projet impressionnant qui a fait plusieurs unes et laissé une vraie empreinte positive.

• Kokogichallenges (Guillaume de Lustrac) : Pour sensibiliser au réchauffement climatique, il a relié 300 stations de ski françaises à vélo en moins de 100 jours (7000 km quand même !) afin de rencontrer les acteurs de la montagne et réfléchir avec eux à des solutions durables. Là encore, un projet à fort impact médiatique.

La balle est dans leur camp

La balle est désormais dans le camp de RMC et de tous ceux qui s'impliqueront dans ce projet.

Deux options s’offrent à eux : Ignorer les critiques et continuer comme prévu. Ou alors saisir cette opportunité en or pour repenser entièrement la logistique et le message, en en faisant une initiative qui marquera les esprits et rentrera dans l’histoire... cette fois pour de bonnes raisons.

Affaire à suivre.